Theodora
Olivi
Programmatrice
Ouverture simple et franche, par un rapprochement. Par un gros plan sur le visage d'une petite fille brune, cheveux longs en bataille. On découvre sa bouche, ses lèvres, ses yeux malicieux, là, directement, face caméra. « J'aurai une caméra comme ça quand je serai grande. Je vais faire toi ». Annonce d'un désir, d'un lien, d'une confusion.
C'est comme un jeu, c'est comme une énigme, cette caméra. Quant à celle qui s'inscrit derrière, quelle histoire ! Mariana Otero s'intègre délicatement mais sans fard à ces habitants du Courtil. Ici, dans la cour carrée, la salle à manger, le bureau des uns ou la chambre des autres, enfants et intervenants partagent une vie. Ces minots là s'arrangent cahin caha avec ce qui les réunit : leur inconscient à ciel ouvert. De saynètes en chansons improvisées, de puzzles en balades au bord de l'eau, entre jardinage et repas, la vie à fleur de peau déploie ses heurts, ses peurs, ses interrogations mais surtout ses richesses incomparables.
La réalisatrice capte et questionne, sans hiérarchie ni préjugé, traçant son sillon, inscrivant et offrant son regard, regard aiguisé et enrichit par ces enfants qui s'adressent tant à elle qu'à l'objet fascinant et perturbant qui prolonge son oeil et sa main, sa caméra.
À ciel ouvert est un film au long souffle, un film intelligent, qui rend hommage au sensible et aux corps mais également au cinéma qui redevient ici un outil essentiel à la fois magique et redoutable.
Publié le jeudi 18 janvier 2018