Pascal
Robin
Programmateur
Avant qu'une aube majestueuse et éternelle ne se lève sur Paris, Claus Drexel nous invite à voyager dans quelques nuits parisiennes en compagnie des plus démunis. Des nuits froides, des nuits bleutées, des nuits désertées, des nuits presque perdues, avec ceux qui vivent seuls, à la rue.
Nous suivons ainsi treize personnes, enfermées dehors, dans les plus beaux quartiers de la capitale. Paris, la plus lumineuse des villes, est par excellence faite pour le cinéma. Paris, décor monumental d'or et de lumières est ici prodigieusement filmé. Les femmes et les hommes, avec qui nous passons une heure quarante, vivent, invisibles, dans ces décors trop grands. Monuments somptueux et édifices publics imposants, pont et tunnels, grilles interminables et murs gigantesques. La Seine coule autant que la lumière des éclairages urbains. La magnificence de ces décors engendre un monde parallèle, à la limite du fantastique. Dans ce monde qu'invente le cinéma, les sans-domiciles, Christine, Pascal, Wenceslas, Costel, Jeni ou Marco se révèlent, désormais visibles et audibles.
Tous, malgré la gravité de leur situation douloureuse, sont magnifiques parce que le cadre dans lequel il leur est proposé d'intervenir est lui-même beau. Ce cadre semble le seul espace qui leur est proposé d'habiter. Posé, à bonne distance, large et généreux, il leur donne une réelle dignité, et leur rend toute leur humanité, de chair et d'os, de voix et de discours. La caméra sait capter avec attention et calme ce qu'ils nous disent de leurs éclats de vie. Leurs réflexions sont le plus souvent d'une grande profondeur. Le spectateur, saisi, les voit et les écoute, comme jamais.
Publié le jeudi 18 janvier 2018