À propos du Challat de Tunis

Nicolas
Milesi

Programmateur

Le Challat de Tunis est de ces films qui arrêtent net l'antienne opposant le cinéma documentaire au cinéma de fiction. En adoptant une forme parfaitement hybride – et qui n'a rien à voir avec le simplisme laminant du docu-fiction – la réalisatrice Kaouther Ben Hania parvient à mettre en image le phénomène de la rumeur. À savoir la part infime de vérité que l'opinion publique boursoufflera des fictions les plus fantasmatiques. En creux, bien entendu, c'est la société tunisienne d'après la révolution – avec sa culture machiste archaïque toujours aussi vivace – que la réalisatrice questionne. Suivie de son caméraman, elle traque l'identité du Challat, presque dix ans après ses forfaits, non sans une persévérance et un courage qui forcent le respect, arpentant une rue tunisienne émaillée de combats de béliers et considérée par bon nombre comme « un piège à péchés ». Vrai geste féministe, ce film donne aussi à rencontrer des femmes pas fatalement victimes et dont les témoignages ajoutent à l'humour corrosif ambiant. Car c'est bien par la dérision que la réalisatrice entend mettre à jour l'hypocrisie dominante autour du statut des femmes tunisiennes. Le quasi-abandon de son but premier – retrouver qui était le Challat de Tunis – devient l'acte de résistance ultime face à des individus qui eurent été fort soulagés de ravaler le « Challat » au rang de fait divers. Au contraire, la réalisatrice met en forme un objet cinématographique d'une intelligence imparable et assez jouissive.

Nicolas Milesi

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Programmateur


Cinéma Jean Eustache

Publié le mercredi 17 janvier 2018

Paroles de programmateurs

Le Challat de Tunis

Un film de Kaouther Ben Hania
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