À propos de Code 68

Serge
Le Peron

A force de considérer Mai 68 comme une évidence, il est devenu une énigme. Une énigme qu'il appartient donc aux générations futures de décrypter. Aux descendants des enfants de Marx et Coca Cola de s'y coller. Avec les moyens du cinéma, pourquoi pas… C'est sur ce postulat ludique que se construit le film de JHR. Une jeune femme, qui est aussi un personnage de cinéma connu pour sa curiosité paradoxale (Anne Buridan, en croisade depuis quelques années déjà), enquête, avec sa caméra et son stylo - pour une fois joliment additionnés - sur le sujet : elle tente de percer le mystère, de pénétrer le code - de forcer la porte et le coffre - 68... Ce dispositif (et singulièrement l'actrice-réalisatrice-personnage qu'est Judith Cahen) donne toute son énergie au film. Anne-Judith arpente sans relâche les rues, les cafés, les apparts, les cours de tennis et autres lieux incongrus à la recherche du secret oublié. Elle avance dans ce labyrinthe, avec ses questions et ses espoirs, elle se cogne aux personnages du Grand Mystère, se perd dans les chicanes des petits récits, se colle devant l'écran fantasmatique de quelques films de légende (eux aussi), traverse les murs du son Coltrane et Jacno, butte sur les non-dits, rebondit sur les aveux...


Ce jeu de l'oie rivettien en apparence, n'en débouche pas moins sur des enjeux de désirs et de séduction, que la réunion de Judith Cahen et Gérard Meylan incarne à merveille. Le film prend tout son sens quand la beauté des sites se conjugue avec la volupté des corps enfin dévoilés. Pas étonnant que son moment d'intensité maximum ait lieu du côté de Marseille, là où le climat et le climax ont l'habitude de se confondre. JHR filme à point nommé, dans les célèbres calanques (toujours aussi belles depuis Cap Canaille), les corps ambrés de ses deux acteurs, bien dans leurs peaux et aussi à l'aise dans leur jeu de cache-cache que des poissons dans l'eau. Cela n'empêche pas, bien sûr, de la gravité, et même une certaine anxiété, de se tramer dans la légèreté apparente de ce propos cinématographié... Code 68 est en effet un film sur la transmission, sujet complexe s'il en est. Pas seulement comment obtenir le fameux code d'accès, mais comment se l'incorporer, le transformer en sujet pour soi, pour l'avenir, mais d'abord pour le présent. C'est une autre paire de manches évidemment. Et c'est ça qui donne à ce film réussi toute son actualité.

Serge Le Peron


Publié le mardi 12 septembre 2017

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Code 68

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