Michel
Andrieu
Cinéaste
Le film commence par l'ombre projetée d'un rideau que le vent agite. D'une certaine manière Franssou Prenant nous avertit : nous verrons l'ombre portée des choses et des gens. Pas les gens eux-mêmes, pas les choses elles-mêmes. Ce rideau qui s'agite doucement dans le soleil est l'écran sur lequel Franssou Prenant projette son film. Ce rideau qui bouge, masque et découvre à la fois.
_ Le film avance sur un fil comme un funambule. Au risque de tomber à chaque plan, à chaque séquence. Mais ce fragile et aérien funambule est solide parce qu'il plonge d'invisibles racines au plus profond du monde et de nous-même. Refusant une dramaturgie traditionnelle, il va trouver des sucs (et des forces) à la fois à l'intérieur des têtes (des nôtres, les leurs) et à l'extérieur. C'est un film qui regarde le monde comme un être vivant.
De l'eau qui coule sur une épaule nue, une tempête dans le désert, un corps hoquetant de souffrance, une ville qui déroule ses nuits blanches, tout ce qui vit et bouge dans le film, hommes et paysages est posé par Frans sou Prenant à la même hauteur : celle de son regard et celle d'une morale. Une morale de l'égalité entre le monde et nous même, où chaque atome, chaque particule fondamentale qu'elle devienne rocher, lumière ou regard se vaut. Mon petit corps… est une œuvre panthéiste. C'est là le mouvement profond du film, celui qui le fait avancer avec légèreté, grâce et drôlerie.
Michel Andrieu
-Cinéaste
Publié le jeudi 14 septembre 2017