Dominique
Crevecoeur
Cinéaste
Marian n'est pas un film séduisant. Il vous saisit au collet dès les premières images comme ce tout petit garçon gitan que les services sociaux arrachent à sa mère et à ses jeux pour le placer en institution et vous propulse avec lui dans le désastre implacable de son arrachement et de son enfermement au milieu d'autres faux-vrais orphelins livrés à une misère affective et sociale à la mesure de celle qui englue les adultes qui les ont en charge. La force de ce film pour moi inoubliable réside dans le regard de Petr Vaclav dont la caméra d'entomologiste, clinique, au scalpel, se faufilant entre la fiction et le documentaire, réussit à capter le mouvement des sentiments enfouis au plus profond de ceux qu'il filme dans les conditions et les lieux mêmes de leurs vies : enfants et adolescents, vrais exclus, oubliés et ignorés du monde, relégués dans le cycle des institutions successives d'encadrement, d'internement, de redressement, de correction, pénitenciaires (quel luxe de vocabulaire administratif pour dire quatre murs !) et à qui le travail sans complaisance ni manichéisme de Petr Vaclav restitue leur dignité et une place dans le monde au moins le temps d'un film dont j'espère pour cette même raison qu'il sera programmé longtemps.
Dominique Crevecoeur
-Cinéaste
Publié le lundi 18 septembre 2017